Philippe Herbet
Overview
(rhizome)
Le rhizome est constitué de tiges souterraines qui s’allongent en poussant des rameaux ou des feuilles à l’une de ses extrémités tandis qu’une partie se détruit. La pomme de terre est l’exemple type du rhizome. Le rhizome pousse de façon imprécise, vague, sans réelles structures ni buts apparents. Mon travail est proche de cette façon de cheminer, de s’étendre sur un territoire.
Le côté « racine » du rhizome m’intéresse également, car il s’agit aussi, pour moi, d’une quête identitaire.
Né à Istanbul, j’ai commencé à parcourir cette ville, à rechercher qui j’étais, attentif aux « rencontres » avec quelqu’un, ou un paysage, quelque chose intensément poétique où le monde se révèle dans toute son harmonie.
Le chemin donne des indices et ces indices m’ont mené vers d’autres pays, notamment l’ex URSS, rejoignant ainsi mes rêves d’enfant. Depuis 2001, je séjourne régulièrement dans la Fédération de Russie, au Bélarus, en Ukraine, en Moldavie, en Transnistrie, en Gagaouzie, au Kazakhstan, pays qui m’ont profondément émus et séduits.
Le Rhizome m’emmène donc vers l’Orient, dans l’axe Russie/Chine/Japon, il m’écarte de moi pour m’emmener vers la découverte de l’autre, du monde. Et de ce que l’on nomme la vie.
Naturellement j’ai choisi un appareil de photographie silencieux, à la visée de poitrine poussant ainsi autant à l’introspection qu’à la révérence. Il faut saisir les choses avant qu’elles se rétractent. Le rendu du processus, que je contrôle du choix des pellicules aux tirages argentiques réalisés dans ma chambre noire (ou sous mon contrôle dans le cas de grands formats), donne une douceur en adéquation avec ma façon d’envisager le monde.
Les voyages, petites fugues en mode mineur, que je fais ne revêtent pas un caractère exceptionnel, ils s’inscrivent dans mon quotidien. Les allers et retours, les navettes régulières, les boucles, forment la dynamique nécessaire à la pousse du Rhizome. Le fil des allées et venues dans les villes ou les territoires que je parcours forme un mini rhizome, un nœud, des points d’attache se forment. Je retourne plusieurs fois au même endroit. Le tout forme ce que j’appelle le Rhizome. Je voyage le plus souvent grâce au chemin de fer (pour lequel j’éprouve une réelle fascination), en autobus ou en bateau.
Les photographies, les textes aussi, mes carnets de voyage, sont les témoins, les pousses, les traces qui subsistent de mes errances. Fragments narratifs, non du voyage, mais d’une histoire – la mienne -, d’autres histoires, d’autres vies dans lesquelles je me fonds. Je voyage comme un rhizome pousse.
Philippe Herbet
Lire plus...Philippe Herbet, Femme en train de photographier, Vladivostok, Fédération de Russie, Septembre 2009, De la série Rhizome oriental, C-print analogique tiré par André Jasinski 1/3, 80 x 80 cm